Les bonnes leçons de Wayne Byars

Il m’était impensable de ne pas l’acheter, aussi me suis-je précipité en librairie dès sa parution. Il m’est tout aussi impensable de ne pas partager avec vous ce livre, et les impressions qu’il m’a inspiré.

Elles ne sont pas forcément objectives: d’abord, rien de ce qui est sur ce blog n’est objectif, puisqu’au royaume de la subjectivité le blog est érigé en grand-duché. Mais surtout, et cela vous le savez peut-être déjà, parce que Wayne Byars est mon professeur. Depuis deux ans et demi maintenant, c’est vers ses cours que je me tourne en priorité, lorsque mon emploi du temps me le permet.

Claire Chazal, élève assidue de Wayne, signe la préface du livre. C’est avec des mots simples mais d’une grande justesse qu’elle y parle de danse, de son rapport avec elle, et de ce que Wayne lui a apporté.

Place ensuite au livre. Wayne enseigne la danse classique à des professionnels, danseurs classiques mais aussi de d’autres disciplines, ainsi qu’à des amateurs, depuis plus de 30 ans. Fort de son expérience des studios et des danseurs qui les peuplent, il propose au lecteur un « cours de danse métaphorique ». Wayne part en effet du constat que « (ses) cours de danse sont une sorte de microcosme de la vie », la danse agissant comme un « miroir grossissant » des habitudes et des réflexes de chacun qui façonnent notre vie quotidienne, l’influencent et parfois, la transforment, comme ils façonnent, influencent et transforment la façon qu’a un être humain de s’exprimer avec son corps, de danser.

Fort de ce constat, et après avoir demandé au lecteur de se placer dans une « posture mentale la plus neutre possible » pour se mettre en position d’apprentissage (comme il le demande quotidiennement à ses élèves), Wayne Byars part d’une « leçon de danse » pour en tirer une « leçon de vie ».

Concrètement, chaque chapitre s’emploie à constater un problème récurrent chez les danseurs, à en identifier la cause et le remède, pour ensuite tirer un parallèle avec les problèmes que peut rencontrer tout à chacun quotidiennement et, de là, une solution.

La première leçon consiste ainsi à « suspendre son jugement » : le jugement sur soi-même et sur les autres est omniprésent en cours, notamment à travers l’outil du miroir. De ce constat et des mauvaises pratiques ou habitudes qui en découlent, le parallèle est ensuite dressé avec le jugement que chacun peut porter sur soi et sur les autres dans « le civil ». Sont ainsi abordés au cours du livre des thèmes aussi divers que la peur, le narcissisme, la discipline personnelle, ou encore un développement très intéressant sur la technique Alexander.

Vous l’aurez compris, il ne s’agit en aucun cas d’un livre de danse au sens technique. Wayne ne vous apprend pas en 20 lignes comment réussir vos pirouettes ou gagner en amplitude de lever de jambe. L’optique est ici plutôt celle du développement personnel, que l’on soit danseur ou non, à travers l’analogie du studio de danse.  

C’est pourtant, profondément, un livre sur la danse. En décryptant les habitudes et les états d’âmes des danseurs, en rapportant témoignages et expériences personnelles, Wayne nous livre un regard singulier sur le monde de la danse, en particulier de la danse classique, probablement jamais rapporté au public par un « insider » avec autant d’honnêteté. Difficulté de l’enseignement, de l’apprentissage de la danse, de la vie professionnelle du danseur (notamment à travers les auditions), du regard des autres, du travail quotidien, de la vieillesse, rien n’est édulcoré. Mais ce n’est que pour montrer combien ces obstacles rencontrés par le danseur sont un frein à la joie de danser, donc à la réussite technique, et partant à la réussite personnelle.

Si ce livre apportera et apprendra beaucoup au danseur amateur et à toute personne n’ayant jamais entendu parler de danse ou n’ayant jamais chaussé un chausson de danse, je suis aussi convaincu qu’il apportera beaucoup au danseur professionnel ou pré-professionnel, de tout âge: les conseils, les constats et les théories qui s’y trouvent sont, je pense, encore trop rares dans le petit monde de la danse, et ce livre est véritablement à mettre entre toutes les mains.

Il se lit très facilement et d’autant mieux que l’écriture est simple, directe, fluide et agréable. En vérité, j’ai été, dès les premières lignes, frappé de constater combien ces mots couchés sur le papier sont ceux que j’entends si régulièrement entre les quatre murs de mon studio, parfois à la virgule près, au point que j’entendais régulièrement la voix de Wayne dans ma tête, accent américain inclus, au cours de ma lecture !

Le plus dur est peut-être de vaincre ses réticences, et d’oser aborder avec un regard neuf, neutre, ces conseils parfois si oubliés qu’ils leur arrivent de passer pour des lieux communs. S’accepter, s’ouvrir à l’autre, agir avec générosité: autant de lignes de conduites qui, aujourd’hui, ont tristement finies par devenir galvaudées, et que le livre nous propose de redécouvrir à travers le prisme de l’expérience concrète que vit le danseur en studio ou en scène: celle de l’esprit face à son corps et face à son environnement.

En résumé, Wayne Byars signe une petite compilation de ses « leçons de danse » les plus fortes, dont il émaille chacun de ses cours et qui rendent son enseignement si unique et précieux, étayées par les développements que permet l’écriture. 

Je n’en jetterai pas plus, sinon ces mots: une lecture impérative de votre automne, à refaire le plus régulièrement possible, par un grand Professeur, oserais-je le terme ?…Un grand Maître. 

2 commentaires Ajoutez le vôtre

  1. BA dit :

    Je l´ai lu et j´ ai beaucoup aimé. Je crois que maintenant mon cou sera plus long et mes épaules mieux placées !
    Etant de très loin la plus agée de mon cours je crois qu´il m´a donné plus confiance en moi.

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    1. ildanse dit :

      Je lui dirai, il sera ravi !!

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